"C'est l'humanité qui finirait dans un alambic duquel il ressortirait l'essence de ce que nous sommes devenus : le jus incolore d'un grand jeu télévisé.".
Il en faut peu pour rendre Anna et son fils Léo passablement heureux : un mobile-home, une planche de surf, un peu de cannabis et une bonne dose de liberté partagée. Surviennent un accident et la perte du camion-rôtissoire qui permettait au duo de subvenir à ses besoins. Un élément déclencheur d'une série d'ennuis et de dettes en cascade.
Pour trouver de l'argent, nerf de la guerre qu'elle a entamée, Anna accepte alors, non sans honte, de participer à un jeu de téléréalité absurde dont l'unique règle consiste à ne plus lâcher la voiture sur laquelle elle aura posé la main...
Joseph Incardona perturbe l'équilibre précaire d'une famille monoparentale pour dénoncer marginalisation sociale, téléréalité dégradante et absence de scrupules des grandes entreprises nationales et du gouvernement tout-puissants. Un roman divertissant qui frôle seulement l'engagement : si le propos est cynique, la réflexion reste souvent superficielle voire inachevée et l'on pourra aussi regretter l'happy end d'une histoire de tendresse filiale néanmoins touchante.
La lecture vaudra donc davantage pour son incursion réussie dans "Le Jeu" qui, en une mise en abyme subtile, place le lecteur dans la même position de voyeurisme et d'attente fébrile que les (télé)spectateurs. Dérangeant et captivant à la fois.
Joseph Incardona, Les Corps solides, Pocket, 2023.
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